Le grand entretien avec Stéphane Moulin (Angers) : «Je ne suis pas le papa que je devrais être parfois»
Au cours d'une ère où les entraîneurs restent de moins en moins longtemps en place, Stéphane Moulin va quitter son siège pour la première fois depuis dix ans. Au cours de près d'une heure et quart d'un riche entretien, le futur ex-coach du SCO se livre comme rarement pour esquisser un bilan de ces dix ans, mais aussi pour porter un regard profond sur sa profession.
«Dimanche 23 mai. 38e et dernière journée face à Lille. 22h50 environ. Comment voyez-vous ce moment, cet ultime coup de sifflet final de l'arbitre pour votre dernier match avec le SCO ?
Avec qui auriez-vous envie de vivre l'après-match ?
Y a-t-il un pincement au cœur de vivre ça à huis clos ?
«Si c'est un bouquin, je trouve qu'il est sympa à lire»
En 2011, quand vous devenez entraîneur d'Angers, vous dites : "Si le début du bouquin n'est pas bon, on n'a pas envie de lire la fin." Au bout du compte, ce bouquin, c'est un best-seller ?
Avez-vous un mot pour résumer dix ans d'aventure avec le SCO ?
Cela a été un leitmotiv ?
Dans vos récentes prises de paroles, on a eu l'impression que vous avez eu très peur de descendre cette saison...
Cela aurait tout gâché ?
«Pour moi, les dix années que j'ai fait à la tête de l'équipe professionnelle, c'est un rêve éveillé. C'est ça que j'ai entretenu. Ça me paraissait tellement inaccessible, tellement loin, que j'ai gardé ça comme quelqu'un qui est un privilégié.»
«Jamais je n'ai imaginé ça quand j'ai commencé avec le SCO»
Revenons dix ans en arrière. Été 2011. Olivier Pickeu vous propose le poste d'entraîneur : vous souvenez-vous de ce moment ?
A ce moment-là, vous êtes qui ?
C'était une de nos questions...
Était-ce un manque de confiance en soi ?
Si un joueur se lève et dit oui...
Des Stéphane Moulin, on en verra encore ?
? Angers SCO est très heureux d'officialiser la prolongation de son entraîneur Stéphane Moulin et de son staff, jusqu'en 2020 !
— Angers SCO (@AngersSCO) February 27, 2018
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Ce serait qui le remplaçant idéal de Stéphane Moulin ?
Si on vous propose de nous citer vos cinq moments les plus forts pendant ces dix ans, que choisissez-vous ?
«Je m'identifie carrément à la ville d'Angers, dans cette douceur d'angevine, dans cette manière de vivre, dans cette humilité, dans cette simplicité.»
«Le temps est un élément déterminant dans le football»
Encore plus vite, vraiment ?
«A Angers, il faut savoir mettre les mains dans le cambouis.»
Pourquoi ce match est-il autant marquant alors qu'on peut penser que c'est une simple journée de Championnat ?
«La victoire à Nantes, un vrai moment de bonheur»
Vous aviez gagné la Coupe du cœur.
Quand vous lui dites qu'il passe numéro 2.
Dans quelle catégorie d'entraîneurs pensez-vous faire partie aujourd'hui ?
«Je sais tellement l'importance qu'a le SCO d'Angers dans cette ville, et qu'ils attendaient tellement ça depuis longtemps que c'est une petite fierté.»
«Les cinq grands Championnats européens, ce n'est quand même pas anodin»
Y a-t-il un joueur avec qui vous avez une relation qui va au-delà de l'entraîneur et de l'entraîné ?
Vous avez dit récemment de ne pas banaliser un maintien en Ligue 1.
Ça vous fait rire jaune...
Ils comptent dans vos dix ans...
Y a-t-il un joueur qui vous a énormément surpris dans sa progression ?
Comment êtes-vous passé de 48 à 24 heures pour digérer ?
En dix ans, avez-vous senti que la pression autour du rôle et du statut d'entraîneur s'est accentuée ?
«Butelle ? Ce n'est pas simple de voir quelqu'un un peu groggy face à soi.»
On a souvent entendu des entraîneurs expliquer qu'ils sont davantage des managers.
Le Stéphane Moulin de 2011 et le Stéphane Moulin de 2021...
Est-ce le même ?
«Aujourd'hui, je considère que je traîne encore cette étiquette»
C'est là aussi que vous découvrez le monde de la Ligue 1.
«Les équipes qui ne jouent pas, elles descendent. On ne peut pas toujours gagner sans jouer. À un moment donné, ça s'arrête !»
«La défaite ? La haine totale»
Est-ce que cela a évolué en dix ans ?
Que faites-vous ?
«On a peur quand on va mourir ou qu'on est gravement malade, on n'a pas peur de perdre un match de foot.»
«Je n'ai pas envie que mon fils voit l'image de son papa en détresse»
Au sujet de sa première saison, quand il luttait pour faire maintenir le LOSC, Christophe Galtier avait dit dans La Voix du Nord : "Lorsque je rentrais chez moi, je m'effondrais par terre en pleurs et je disais à mon épouse que je n'allais pas y arriver." Avez-vous pu en arriver là ?
Est-ce que vous comprenez que ça puisse arriver chez certains entraîneurs ?
«Avant que je commence ce métier, on m'avait dit : "Tu verras, tu changeras, dans ce métier, c'est obligé. Les médias, la télé..." Je n'ai jamais changé. Et j'en suis fier.»
«On a l'impression que l'image prend le pas sur la valeur humaine»
En 2017, dans France Football, vous avez dit : "Pour moi, on n'est pas un homme meilleur quand on entraîne en Ligue 1 que lorsqu'on le fait le dimanche en étant maçon le reste de la semaine." Vous avez parfois senti être en décalage avec ce monde ?
«Je ne veux pas me rendre malade parce que je n'ai pas de club»
Savez-vous ce que vous ferez dans le futur ?
Stéphane Moulin sans football, c'est possible ?
Du coup, la possible perspective d'être sans foot la saison prochaine, votre femme, elle en pense quoi ?
Timothé Crépin Suivre @T_Crepin