
Torino, 9/2/2021. Coppa Italia. Juventus vs Inter. Nella foto: Demiral *** Local Caption *** (Alberto Gandolfo/RAMELLA/PRESS/PRESSE SPORTS)
Turquie : Merih Demiral, poli en Italie
En ouverture de l'Euro, Merih Demiral (23 ans), défenseur de la Turquie, va retrouver des joueurs et un pays, l'Italie, qui l'ont vu se révéler. Retour sur les cinq matches qui ont marqué la progression du bestial arrière central de la Juventus auparavant passé par Sassuolo.
Sassuolo – Naples (1-1, 10 mars 2019)
Seulement sa troisième apparition avec l’équipe de Roberto De Zerbi, la première dans un système à trois défenseurs centraux, pas forcément l’organisation qui le met le plus en valeur. Arrivé dans les dernières heures du mercato hivernal à Sassuolo en prêt avec option d’achat obligatoire (9 M€) en provenance d’Alanyaspor, il débute contre la SPAL (1-1, 24 février) et ne quitte plus le onze de départ (14 matches consécutifs), quel que soit le système tactique choisi par son entraîneur. Face aux hommes de Carlo Ancelotti, Demiral montre déjà tout ce qui le caractérise : son impact physique dans les duels, sa capacité à se montrer décisif par des gestes spectaculaires et une belle pointe de vitesse une fois lancé. Un condensé de ses qualités (agressivité, dynamisme, explosivité) est résumé en une action : celle où il revient à la course sur Dries Mertens lancé en profondeur et qui se présentait devant Gianluca Pegolo pour lui enlever in extremis le ballon d’un tacle puissant et salvateur. Les présentations avec l’Italie sont faites.
Sassuolo – Chievo Vérone (4-0, 4 avril 2019)
Alors que les Neroverdi restent sur 8 matches sans victoire en Serie A (5 défaites et 3 nuls) et commencent à glisser dangereusement au classement, c’est lui qui, de deux bons gros coups de boule (un en début de partie, l’autre juste avant le repos) à la suite de phases arrêtées, permet à son équipe de se rendre la partie facile et de souffler un peu. Ce grand gabarit, lancé en sélection turque par Mircea Lucescu le 20 novembre 2018 face à l’Ukraine (0-0) mais installé par Senol Günes, se montre très souvent dominant dans le jeu aérien et sait apporter du danger dans la surface de réparation adverse sur coups de pied arrêtés. Mais on aurait tort de le réduire à ses capacités athlétiques. Pas embêté avec le ballon, il a très vite répondu aux demandes de De Zerbi, soit en prenant la responsabilité de prendre l’espace libre devant lui en accélérant pour s’insérer un cran plus haut, soit par un jeu long plutôt prometteur. Mis sous pression, il a également montré sa faculté à relancer plutôt proprement sans paniquer.
Juventus – Hellas Vérone (2-1, 21 septembre 2019)
Très vite séduite, la Vieille Dame passe à l’action et offre à Sassuolo le double (18 M€) de ce qu’il a dépensé pour mettre le grappin sur l’une des révélations de la seconde partie de saison en Italie (48 dribbles repoussés, personne n’a fait mieux sur la période). Pour ses débuts en Championnat avec les Bianconeri, à domicile, il est attendu et observé de près. S’il n’est pas sans appel, le jugement fait mal. Demiral provoque un penalty que ne transforme pas le Hellas et, surtout, il ne rassure pas. L’international turc affiche toutes les limites de son envie et même de son amour du combat, en même temps que celles d’un jeune défenseur encore perfectible sur le positionnement de son corps, la gestion de son engagement et des espaces qu’il ouvre dans son dos. Maurizio Sarri le renvoie sur le banc des remplaçants pour les 11 matches de Serie A suivants. Alors que Giorgio Chiellini est absent pour de longs mois, le technicien transalpin lui préfère Daniele Rugani lorsqu’il décide de faire souffler la moitié de sa paire de titulaires Bonucci-De Ligt.
Bayer Leverkusen – Juventus (0-2, 11 décembre 2019)
Une deuxième chance lui est donnée en Ligue des champions lorsque la Juve, déjà qualifiée et assurée de terminer à la première place de son groupe, se déplace à Leverkusen. Pour ses débuts dans la compétition, Demiral affirme sa personnalité, affiche son caractère, crève l’écran et écœure les joueurs offensifs du Bayer, que ce soit Moussa Diaby, Kai Havertz, Lucas Alario puis Kevin Volland. En plus de la puissance bestiale qu’il dégage et qui marque les esprits, son sens de l’anticipation et sa propension à jaillir devant son adversaire direct impressionne. Après la partie, Sarri le reconnaît sans peine : «Il a fait un grand match et n’a pratiquement rien manqué. Il est très fort physiquement, agressif mais aussi explosif, et il attire beaucoup plus l’attention que les autres.» À tel point que le coach des Juventini le préfère à Matthijs de Ligt pour les quatre rencontres qui suivent en Championnat. De grands noms du football italien comme Beppe Bergomi s’enthousiasment à son sujet. Libérée, la bête est lâchée.
AS Roma – Juventus (1-2, 12 janvier 2020)
Ce soir-là, à l’Olimpico, la grave blessure de Nicolo Zaniolo éclipse celle de Demiral. Douze minutes après avoir ouvert le score et inscrit son premier but avec la Juventus, du tibia droit à la réception d’un coup franc de Paulo Dybala, il s’écroule après une mauvaise réception suite à un duel aérien gagné et comprend immédiatement. Son ligament croisé antérieur du genou gauche est touché et sa saison, comme son ascension, est stoppée net. Revenu sur le terrain sous la direction d’Andrea Pirlo, le défenseur turc ne parvient pas à retrouver la pleine possession de ses moyens, ni à dégager la même impression visuelle, la faute à plusieurs lésions musculaires souvent inévitables après une telle blessure qui l’ont empêché d’enchaîner. Alors que son avenir en Italie pourrait être discuté cet été, ce match d’ouverture de l’Euro est l’occasion parfaite pour rappeler au pays qui l’a vu prendre son envol que les promesses d’hier ne se sont pas envolées. - T.S.