FILE PHOTO: Soccer Football - Championship - Derby County v Stoke City - Pride Park, Derby, Britain - December 12, 2020 Derby County's manager Wayne Rooney reacts Action Images/Molly Darlington EDITORIAL USE ONLY. No use with unauthorized audio, video, data, fixture lists, club/league logos or 'live' services. Online in-match use limited to 75 images, no video emulation. No use in betting, games or single club /league/player publications. Please contact your account representative for further details./File (Reuters)

Wayne Rooney coach, les premières gammes à Derby County

Promu officiellement entraîneur de Derby County en Championship (D2) le 15 janvier, Wayne Rooney commence à 35 ans sa deuxième vie sur le banc de touche des Rams après une carrière riche en nombreuses victoires. Mais à quoi ressemble vraiment la patte Rooney ?

Pride Park, le 7 novembre dernier. Dans l’antre de Derby County, Barnsley vient s’offrir un succès 2-0. Sur le banc, Phillip Cocu, visage fermé, le sait, il vient de vivre probablement son dernier match à la tête des Rams. Quelques jours plus tard, le couperet tombe et d’un commun accord avec sa direction, l’ancienne gloire néerlandaise est priée de faire ses valises, laissant le club à la toute dernière place de Championship. Pour assurer l’intérim, Wayne Rooney est nommé entraîneur-joueur. L’objectif est clair, sortir Derby County de cette mauvaise passe. Et forcément, l’ancienne star de Manchester United est attendue au tournant. «Rooney avait une grosse tâche à accomplir après le départ de Cocu, l'équipe était en manque de confiance et complètement démotivée, confie Simon Long, créateur du podcast The Ramswritter et supporter du club. Mais dès le départ, il savait très bien où il allait. C’était un rôle qu’il voulait».
 
En effet, cette envie indicible de devenir entraîneur n’est pas venue du jour au lendemain pour Wayne Rooney. Il faut revenir quelques mois en arrière, traverser l’Atlantique, et se rendre en Major League Soccer pour remonter à la genèse de cette vocation. Alors âgé de 33 ans et capitaine de DC United, à Washington, l’ex-international anglais en a pleinement conscience : sa carrière touche bientôt à sa fin. «Je ne suis pas surpris qu’il soit devenu coach, raconte le défenseur français Frédéric Brillant qui a côtoyé "Wazza". À DC United, on en avait déjà parlé ensemble. Il commençait à passer ses diplômes. Il avait même eu quelques examens. On avait le même âge, on s’entendait bien et on parlait du coaching assez régulièrement car je commençais moi aussi à passer mes diplômes et à envisager la suite».
 
Une suite que Wayne Rooney a vu arriver à grandes enjambées. Après une petite saison flanqué du maillot des Rams et trente-trois rencontres disputées, l’Anglais a endossé le costume d’entraîneur-joueur pour deux rencontres (face à Bristol City et Middlesbrough) avant de s’asseoir définitivement sur le banc contre Wycombe à la fin du mois de novembre, et laisser les crampons aux vestiaires. À ses côtés, un staff composé de plusieurs noms bien connus du football britannique : Liam Rosenior, Shay Given et Justin Walker. Car le natif de Liverpool veut s’entourer de personnes de confiance et relever son premier défi avec brio. «C’est quelqu’un de simple, humble, proche de ses coéquipiers et surtout, il pousse l’équipe vers le haut, c’est un leader, décrit Frédéric Brillant. Quand le coach avait besoin de lui à DC United, il répondait toujours présent, mais en laissant une barrière. Il ne s'immiscait pas dans la tactique. Par contre, il donnait déjà des conseils et sa vision du jeu».

Appelez-le coach Rooney

À Derby, la patte Rooney ne tarde pas à être entraperçue. Dès les premières rencontres, en contradiction avec son prédécesseur Phillip Cocu qui privilégiait la possession du ballon, Wayne Rooney impose un style plus défensif et refait confiance aux hommes expérimentés du vestiaire comme Curties Davis (35 ans), Craig Forsyth (34 ans) et Colin Kazim-Richards (34 ans). Exit donc certains jeunes. Dernier de Championship, la situation sportive de Derby est alors catastrophique et le club doit impérativement prendre des points afin de relever la tête. Les résultats ne tardent pas. En décembre, les Rams enchaînent six rencontres sans défaite et gagnent deux places au classement. De quoi un peu souffler. «Jusqu'à présent, il réalise un travail plutôt intéressant, confie Ryan Conway, journaliste pour The Athletic à Derby, les joueurs jouent plus vite vers l’avant et travaillent mieux défensivement. Derby County n’a concédé que cinq buts depuis qu’il a pris en main l’équipe. C’est une équipe difficile à jouer». Simon Long enquille : «Il va à l’essentiel. Contrairement à Cocu, il demande aux défenseurs d’allonger vers l’avant car Kazim-Richards est un bon point de fixation et peut remiser. Sa tactique ressemble à celle de Steve McClaren quand il coachait le club entre 2013 et 2014. D’ailleurs, Rooney prend souvent des conseils auprès de lui. Au début, j’étais sceptique, mais pour l’instant, l’équipe va un peu mieux et il a créé un vrai état d’esprit». 
 
Si les résultats sportifs semblent meilleurs qu’ils ne l’étaient depuis la prise de pouvoir de Rooney, malgré une 23e et avant-dernière place au classement avant la 26e journée de Championnat, la situation en coulisses reste elle très préoccupante. En proie à d’importantes difficultés économiques, Derby County est actuellement placé sous embargo et ne peut pas recruter, ni même verser de salaires aux joueurs qui composent l’effectif depuis décembre. La faute à un rachat du club qui tarde à aboutir. «Le fonds d’investissement émirati Bin Zayed International LLC dirigé par Sheikh Khaled bin Zayed Al Nehayan devait racheter le club, ajoute Simon Long. Un accord de principe avait été trouvé en novembre. Mais rien n’a encore été conclu car des doutes subsistent sur un différend financier entre le fonds émirati et le cabinet d’avocat Pinsent Masons». Et ce, sur un tout autre sujet, le rachat avorté de Newcastle il y a quelques mois…

Dans ce contexte ombrageux, entouré de doutes sportifs et financiers, Wayne Rooney fait avec les moyens du bord et un effectif relativement jeune (26 ans de moyenne d’âge) alors qu’il vient d’être officiellement nommé entraîneur des Rams pour deux ans et demi le 15 janvier. Une situation peu idéale quand on connaît l’homogénéité du Championship, aussi bien en haut qu’en bas du classement, et son calendrier de marathonien (46 journées). «Il a montré des choses encourageantes pour le moment, mais sans recrutement, il va falloir trouver des solutions. Nous n’avons pas encore vu Derby enchaîner deux victoires consécutives. Malgré tout, il y a du potentiel», souligne Ryan Conway. Reste maintenant à trouver la recette et maintenir Derby County en Championship, avant, pourquoi pas, de jouer une potentielle montée en Premier League la saison prochaine. «Il a tout gagné dans sa carrière, c’est un personnage avec beaucoup de caractère. Il a joué dans des grands clubs et il a une vraie vision du foot. Il a tout pour faire des belles choses là-bas», conclut Frédéric Brillant, son ancien coéquipier aux États-Unis. Après tout, la deuxième vie de l’infernal Wayne Rooney ne fait que commencer.

Thomas Bernier

«Derby County n'a concédé que cinq buts depuis qu'il a pris en main l'équipe. C'est une équipe difficile à jouer»